Par Eliane Laxague
Article paru dans le TresSage 7 de décembre 2016.
Quel que soit le registre, toute pratique professionnelle évolue dans le temps. Loin d’y échapper, la pratique professionnelle de la Sophrologie Dynamique® (SD) se transforme autant et aussi vite que la conscience humaine qu’elle étudie et cherche à élargir. Il est donc naturel de faire régulièrement le point, chacun en fonction de ses besoins.
Une question d'éthique
Basée sur l’alliance avec le/les apprenants, l’exercice de notre pratique reflète et révèle aussi nos propres transformations. La relation est source de croissance réciproque. La légitimité du sophrologue que nous sommes s’ancre dans notre éthique devenue réalité vécue dans les différents plans de notre personne, puisqu’ils interfèrent dans nos prises en charge.
La pratique de la SD, dans le respect de l’éthique à laquelle tout sophrologue diplômé adhère, doit pouvoir aider l’autre à trouver en lui l’énergie de faire comme il le décide et non à lui dire comment s’y prendre. C’est ce que nous proposent les différents accompagnements possibles. Ils sont indispensables, en début de pratique pour progresser et travailler sereinement, ensuite pour associer à la routine et son aspect sécurisant, la créativité de l’instant présent qui la transcende.
Premiers pas
L’enthousiasme du sophrologue débutant fort de ses connaissances nouvellement acquises, certifiées par le diplôme obtenu s’émousse parfois très vite, dès les premières difficultés rencontrées sur le terrain. Et les questions se posent à tous les niveaux… de difficulté en désillusion… Et pourtant je suis sophrologue ! Je devrais y arriver facilement.
Mais non, mes groupes s’étiolent très vite ; tout comme ma créativité. Je ne sais pas me faire payer, mes séances sont trop longues, mon local ne correspond pas bien à mon activité… la liste des doléances est longue ! Ce n’est donc pas parce que j’ai décroché mon sésame que je trouve les bonnes ressources ! J’ai du mal à me l’avouer mais je ne devrais quand même pas en être là.
Je laisse tomber ? Après tout, j’ai le choix… faire ce qui est bon pour moi ; c’est bien ce que je retiens de ma formation. C’est l’essentiel, non ? Je ne vais tout de même pas m’infliger des difficultés supplémentaires au quotidien.Pour certains l’aventure s’arrête là.
Après la désillusion
D’autres, passée la phase de rejet commencent à utiliser l’outil.
D’abord pour eux-mêmes ! Les voilà retrouvant le chemin de :
Un monde de possibles
Essayons de voir un peu plus clair, de décrypter comment les possibles actuels, utilisés régulièrement, peuvent nous aider et stimuler nos capacités d’animation en SD.
Notre transmission s’améliore au fur et à mesure que nous intégrons les connaissances apprises et répétées.
Arrivent, malgré tout, les moments d’essoufflement, de doute… Nous avons besoin de nous nourrir. Ce besoin nous conduit souvent à explorer d’autres techniques ; pour mieux revenir à la SD qui tant nous fait du bien. Cependant la routine de nos exercices quotidiens pratiqués seul ou en groupe ne suffit plus.
Les séminaires d’approfondissement
Ils sont proposés régulièrement par l’école ou l’AES. Les fondamentaux sont repris et approfondis. Les sujets variés tentent de répondre à la demande du plus grand nombre : la relation d’aide avec les stages de CNV ou les coulisses du sophrologue ; les stages à thème directement prétextes à la prise de conscience de l’énergie de l’ombre ou encore les stages en direction de la pratique avec les enfants, les futures mamans…
Ils sont l’occasion d’un autre regard, nous enrichissent et révèlent nombre de capacités encore non explorées en nous. L’horizon s’élargit. Mais surviennent de nouvelles questions. Comment poursuivre, mettre en mouvement ses énergies nouvellement découvertes sans dénaturer l’outil SD ?
Les analyses de pratiques
Elles comprennent les groupes de parole, l’analyse systémique, l’intervision et bien d’autres techniques encore chacune ayant ses spécificités, aucune ne pouvant se substituer à l’autre.Nous retiendrons ici l’intervision, commode à mettre en place dans le monde sophro.
L’intervision, ou comment éviter de rester seul face à ses interrogations ?
L’intervision est une méthode bienveillante d’observation et de réflexion sur les pratiques professionnelles des sophrologues qui s’inscrit dans la dynamique d’amélioration de la qualité des prestations proposées.
Ni lieu de bavardages, ni mur des lamentations, ni formation, c’est une plateforme d’échanges, sorte de caisse de résonance entre professionnels qui partagent les mêmes convictions, valeurs et souhaitent élever leur niveau d’expérience et de compétence.
Elle se déroule entre pairs ; personnes qui travaillent dans un contexte professionnel semblable, de façon confidentielle et hors toute hiérarchie. Elle nuance et enrichit l’autoévaluation, l’évaluation et la supervision. Il s’agit ici moins de trouver des connaissances en terme de contenu que d’augmenter son professionnalisme en s’appuyant sur ses propres expériences ainsi que sur celles de ses collègues.
Le simple fait de participer à un tel groupe, sans apporter dans un premier temps soi-même de question, permet de développer sa capacité à s’interroger, réfléchir, échanger.Dans cet espace ressource, théorie et pratique se relient. Trouver une solution possible ensemble augmente la confiance en sa propre capacité de résolution.
Le non jugement devient réalité vécue ; les techniques de communication élémentaires sont de mieux en mieux maîtrisées pour le grand profit de chacun et de ceux qui viennent à nous.L’intervision est aussi un bon moyen de lutter contre le sentiment d’isolement de certains.
L’intervision est différente d’une « vérification confraternelle » en ce sens que son processus nécessite un accompagnateur. Celui-ci, choisi arbitrairement pour la séance parmi les pairs, a la responsabilité de la vigilance : éviter le bavardage qui n’engage à rien ; soutenir la communication mutuelle établie entre les participants.
Le travail se structure autour d’un sujet, d’une pratique mise en œuvre et des problèmes professionnels rencontrés. Les questions sont souvent ouvertes. La recherche de précision des facteurs sous-jacents au problème et quelles pourraient être les solutions possibles se fait collectivement. L’accompagnateur est garant du respect de l’objectif fixé en début de séance par les participants.
L’analyse ainsi proposée permet la mise en évidence du ressenti individuel de la problématique de l’apprenant, patient, client.
Souvent le sophrologue est maillon d’une chaîne, constituée de la famille, des soignants, éducateurs… La pratique sophrologique doit s’insérer dans le projet global, pluridisciplinaire, de soutien de la personne. L’intervision facilite cette insertion.
En fin de session, chacun, porteur de problème ou non définit pour lui même quels éléments utiles il retire de la discussion et comment il compte les mettre en œuvre par la suite.
La supervision ou le recyclage
Une intervision accompagnée par un supérieur hiérarchique devient une supervision.
Mais pas de supérieur hiérarchique au sens habituel dans notre monde ! Nous collaborons, chacun à sa juste place. Celle des maîtres praticiens, (directeurs d’école, formateurs, assistants…) est singulière. Super-sophrologues ? Non, passionnés par la pratique de la SD, ils déploient une énergie phénoménale à la rendre accessible au plus grand nombre. Ils s’assurent que les sophrologues référencés exercent conformément au code de déontologie qu’ils ont approuvé. Ils sont garants de la visibilité et du déploiement de la SD dans l’espace extérieur. Si les variantes culturelles existent, loin de fragiliser l’outil, elles l’enrichissent sans le dénaturer.
C’est le propos des supervisions proposées par l’AES. Le référencement sur le site exige d’être régulièrement supervisé. Ce travail de l’ombre parfois mal vécu génère sa lumière apportant une réelle reconnaissance qui débouche sur des ouvertures dans l’espace public.
En toute liberté, peut-être hors du monde sophro : la supervision
C’est l’espace ouvert et choisi par le sophrologue pour lui permettre de réfléchir sur ce qu’il met personnellement en jeu dans sa pratique quotidienne auprès de ses usagers. Avant le sophrologue, c’est l’être humain qui est engagé dans la relation. Il est donc libre de choisir le superviseur qui lui convient ! Celui-ci, extérieur au quotidien du sophrologue peut même venir d’un autre monde que celui de la sophrologie. C’est une rencontre entre deux personnes et leurs outils ; relation qui ouvre la voie d’une collaboration authentique. C’est une initiative qu’il est libre à chacun de prendre.S’il est impossible d’obliger quelqu’un à une supervision, l’y inciter ouvre souvent des horizons. Comprendre un peu mieux ce que nous mettons en jeu dans l’alliance ; comment nous sommes parfois catalyseurs de mouvements énergétiques vécus par l’autre et comment aussi nous pouvons devenir limitant, freinant l’accès de l’autre à ses propres ressources permet les ajustements et rectifications nécessaires. Nous acceptons mieux d’apprendre de l’autre tout en utilisant l’outil, en toute humilité. Les capacités de transcendance de l’un comme de l’autre en sont vivifiées. L’énergie de vie s’écoule à nouveau de part et d’autre, créative. Clarté et luminosité sortent de l’ombre !
À la croisée des chemins : « les coulisses du sophrologue »
Un temps fort original : tous réunis nous expérimentons et réfléchissons à notre engagement personnel dans l’alliance. Nous observons ce qui s’y joue et repartons nourris et stimulés. Quelques parts d’ombre mise en lumière vont libérer leur énergie au cours des mois à venir.
Si la routine permet d’entretenir les acquis, les temps forts stimulent ; nous remettons nos certitudes en jeu. Nos talents sortent de l’ombre et éclairent le chemin.
Les deux dynamiques se potentialisent l’une l’autre. Ayons confiance en la vie et utilisons le ferment transformateur : l’entraînement, voie vers le tout possible.